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Professions libérales réglementées : Analyse de la réforme sur les sociétés d’exercice

L’ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 a refondu en un seul texte l’ensemble des règles régissant l’exercice en société des professions libérales réglementées. Si l’essentiel du dispositif est repris à droit constant, il contient un certain nombre d’avancés au niveau des quatre formes sociétales objets de cette ordonnance que sont les SCP, les SEL, les SPE et les SPFPL.

Analyse détaillée des principales dispositions des six livres qui composent l’ordonnance condensant tous les textes relatifs aux sociétés d’exercice des professions libérales. A lire au moins une fois avant de se restructurer !

Genèse d’un texte attendu depuis un an

Depuis 2015 et l’intronisation des sociétés de droit commun pour les professions libérales réglementées, la confusion règne. La loi de 1990 introduisant les SEL est devenue de moins en moins lisible notamment depuis 2015.

En effet, la complexité des dispositions a pu suggérer que les sociétés d’exercice libéral étaient des formes juridiques autonomes alors qu’elles ne sont, pour les professions libérales réglementées, qu’une adaptation sur mesure des dispositions régissant les sociétés de capitaux de droit commun (SARL, SA, SAS, SCA).

Les professions juridiques ou judiciaires ont donc pu jouir d’un accès :

– à des SARL (sous forme de SEL) adaptées par le truchement de la loi de 1990

– ainsi qu’à des SARL adaptées par le biais d’un autre régime ouvert en 2015.

Ainsi, l’accès aux SARL par des professions juridiques ou judiciaires est possible par la voie de deux régimes extrêmement proches, sans que cette dualité ne soit justifiée. Cette juxtaposition de régimes d’adaptation a par ailleurs ajouté à la confusion sur les dispositions applicables et donc à l’insécurité juridique pour les professionnels.

L’ordonnance du 8 février 2023 met fin à ce régime de coexistence de sociétés jumelles qui a duré 7 ans. Désormais, l’exercice en société de capitaux passera nécessairement par les SEL, qui deviennent ainsi les sociétés de droit commun créées sur mesure pour les professions libérales réglementées.

Notre article précédent revenait sur les conséquences de cette suppression à la fois pour les sociétés d’exercice et les sociétés holding (à retrouver ici : L’ordonnance du 8 février 2023 bouleverse le paysage juridique des professions réglementées)

Au-delà de cette clarification, l’ordonnance a apporté un certain nombre de réponses. Oui, les SEL sont confirmées, de même que les SCP qui sont également maintenues. De nouvelles précisions sont apportées sur les SPE (Société pluri-professionnelle d’exercice) et sur les SPFPL (société holding).

Conformément aux termes de l’habilitation, la présente ordonnance modifie en profondeur le paysage juridique de l’exercice en société des professions libérales réglementées.

Cette ordonnance propose de fondre en un texte unique les textes transversaux aux professions libérales réglementées. Ainsi seront abrogées la loi n° 66-879 et la loi n° 90-1258 précitées dont la substance sera reprise au sein de l’ordonnance.

Cette réécriture permet d’expliciter les dispositions applicables selon une grille de lecture envisageant le type de société (SCP, SEL, SPE et SPFPL) en fonction des professions visées.

Livre I : Définitions

Au vu de l’imprécision des textes et des incompréhensions qu’ils ont suscitées, un travail de co-construction avec les ordres professionnels a été fait pour définir un certain nombre de concepts notamment ce qu’est une profession libérale réglementée.

Une attention particulière a été apportée à la notion de « professionnel exerçant ».

Le livre 1 regroupe les définitions permettant une clarification par le biais de principes communs.

La notion de profession libérale réglementée ainsi que les trois familles qui la composent sont précisées ici, afin de délimiter clairement le champ d’application du régime encadrant leur exercice en société et d’identifier ainsi au mieux les besoins propres à chacune de ces professions.

1.1- Définition d’une profession libérale réglementée

Les professions libérales réglementées regroupent les personnes exerçant à titre habituel, de manière indépendante et sous leur responsabilité, une activité ayant pour objet d’assurer, dans l’intérêt du client, du patient et du public, des prestations mises en œuvre au moyen de qualifications professionnelles appropriées.


Ces professions sont soumises à un statut législatif ou réglementaire ou leur titre est protégé.


Elles sont tenues, quel que soit le mode d’exercice de leur profession et conformément aux textes qui en régissent l’accès et l’exercice, au respect de principes éthiques ou d’une déontologie professionnelle susceptibles d’être sanctionnés par l’autorité compétente en matière disciplinaire.

Les professions libérales réglementées sont regroupées en trois familles :

– La famille des professions de santé réunit les professions libérales réglementées mentionnées à la quatrième partie législative du code de la santé publique ainsi que les biologistes médicaux ;

– La famille des professions juridiques ou judiciaires, dont la liste est précisée par décret ;

– La famille des professions techniques et du cadre de vie réunit les autres professions libérales réglementées.

1.2- Définition du professionnel exerçant

« Le professionnel exerçant est une personne physique ayant qualité pour exercer sa profession ou son ministère, enregistrée en France conformément aux textes qui réglementent la profession, et qui réalise de façon indépendante des actes relevant de sa profession ou de son ministère ».

Il est précisé que la seule réalisation d’actes de gestion ne confère pas la qualité de professionnel exerçant. L’exercice du mandat social ne suffit pas, il convient d’exercer le métier (fonctions techniques).

Livre II – Dispositions générales relatives aux SCP (sociétés civiles professionnelles)

Les SCP sont encore là ! L’ordonnance reprend majoritairement à droit constant une grande partie de la loi n° 66-879 précitée qui est un texte ancien et stable.

La loi n° 66-879 précitée traite des sociétés civiles professionnelles (SCP), qui sont des sociétés d’exercice, des sociétés de moyen et des sociétés coopératives.

Ces trois formes de sociétés sont intégrées d’un bloc dans l’ordonnance relative aux professions libérales réglementées.

Nous ne reprenons ici que les modifications apportées par le texte ou les points de difficultés laissés en l’état, relatifs à cette forme sociale sclérosée et très rigide.

2.1- Personne morale toujours « out »

En effet la SCP empêche toute évolution dans bon nombre de situations, interdisant toujours l’accès à son capital à des personnes morales (donc les sociétés holding sont bannies)

Pas d’évolution apportée par l’ordonnance sur ce point.

2.2- Pas d’immatriculation et de kbis avant la parution au JO

Son immatriculation reste suspendue à l’agrément de celle-ci par l’autorité compétente ou son inscription sur la liste ou, le cas échéant, au tableau de l’ordre professionnel.

Pas d’évolution apportée par l’ordonnance sur ce point.

2.3- SCP pluri-professionnelle

Ledit décret maintient la possibilité d’un l’exercice pluri-professionnel en commun au sein d’une même SCP, entre plusieurs personnes physiques exerçant des professions libérales différentes. Ce serait donc une société pluri-professionnelle d’exercice (SPE) qui n’en porterait pas le nom puisque l’exercice en commun serait ici au sein d’une SCP pluri-professionnelle.

2.4- Uniquement des professionnels exerçants

La SCP empêche également toute évolution pour les personnes physiques (contrairement aux SEL), leur interdisant toujours l’accès au capital si elles n’y exercent pas (donc multi-détention impossible).

L’unicité de détention est toujours là : tout associé ne peut être membre que d’une seule société civile professionnelle et ne peut exercer la même profession que dans le cadre de cette société.

Pas d’évolution apportée par l’ordonnance sur ce point.

2.5- Toujours pas de SCP unipersonnelle mais délai de régularisation doublé

La SCP doit être constituée au minimum par deux associés personnes physiques. Si, après le départ de l’un d’entre eux, la SCP devient unipersonnelle, le délai d’1 an se régulariser a été prolongé à 2 ans.

2.6- Transformation d’une SCP à une majorité enfin définie

Aujourd’hui et en l’absence de texte clair, cette décision était tranchée selon la rédaction des statuts.

A partir du 1er septembre 2024, la transformation d’une SCP en SEL pourra être décidée à la majorité des 2/3 des associés (et pas des 2/3 des voix).

2.7- SCP sans office avec des titulaires ayant chacun un office

Nouveauté : Des personnes physiques titulaires d’un office public ou ministériel et exerçant la même profession peuvent également constituer entre elles des sociétés civiles professionnelles pour l’exercice en commun de leur profession, sans que ces sociétés soient elles-mêmes nommées titulaires d’un office.


Ces sociétés ne sont pas soumises aux conditions d’agrément ou d’inscription.

Sauf erreur de notre part, cela constitue une nouveauté permettant donc à plusieurs titulaires de se réunir au sein d’une SCP sans y apporter leur office. La SCP serait ainsi une société de moyens permettant la mutualisation de ressources matérielles et humaines.

2.8- Capital social de la SCP

Les textes actuels imposent à toute SCP, pour la fixation de la valeur nominale d’une part sociale, une valeur minimale de 152,45 € (soit 1 000 francs).

Le nouveau texte de l’ordonnance ne semble pas reprendre cette obligation, ce qui est heureux au vu de l’incongruité de cette disposition, parfois non respectée puisqu’elle n’était ni connue ni justifiée.

« Le capital social est divisé en parts égales qui ne peuvent être représentées par des titres négociables.
Le décret particulier à chaque profession peut limiter le nombre des associés.
« 

Il convient donc d’attendre le décret concernant votre profession pour être définitivement fixé sur ce point.

2.9- Mise à jour du capital tous les 5 ans

Dans les SCP, il est de droit, au bout de la 10ème année d’exercice puis tous les 5 ans, de procéder à l’étude de la mise à jour du capital (point peu respecté malgré son caractère obligatoire et surtout au vu des conséquences en cas de non-respect).

L’article 43 du décret n° 69-1274 du 31 décembre 1969 « pris pour l’application à la profession d’huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles » dispose que :

«  Si la constitution de réserves au moyen de bénéfices non distribués ou le dégagement de plus-values d’actif dues à l’industrie des associés le permet, il est procédé périodiquement à l’augmentation du capital social et les parts sociales ainsi créées doivent être attribuées à tous les associés, y compris à ceux qui n’ont apporté que leur industrie. Les statuts fixent les conditions d’application des dispositions de l’alinéa précédent. »

Les statuts de SCP précisent en général à ce sujet que « l’ordre du jour de l’assemblée statuant sur les comptes annuels comporte l’examen de l’opportunité de l’augmentation du capital » :

– à compter du 10ème exercice social,

– puis tous les 5 ans.

L’augmentation de capital doit être décidée s’il est constaté une plus-value d’actif due à l’industrie des associés. En pratique, l’actif ici visé est le droit de présentation qui est susceptible de prendre de la valeur du fait du travail des associés.

Concrètement, tous les 5 ans, il s’agit de convoquer une AGE pour s’assurer de la bonne valorisation du droit de présentation au bilan de la Société par rapport à sa valeur réelle.

S’il y a plus de 20 % d’écart, les associés procèdent à l’augmentation du capital social de la Société nécessaire pour permettre l’ajustement de la valeur d’actif du droit de présentation.

Se pose alors la question du caractère obligatoire (ou non) de cette augmentation de capital permettant la mise à jour de la valorisation du droit de présentation.

Dans le nouveau texte de l’ordonnance, qui renvoie au décret à paraître : « Sauf dispositions contraires du décret particulier à chaque profession, la valeur des parts sociales prend en considération une valeur représentative de la clientèle civile. Toutefois, à l’unanimité des associés, les statuts peuvent exclure cette valeur représentative de la clientèle civile de la valorisation des parts sociales ».

Le mérite de cette rédaction est de rappeler que les associés peuvent renoncer à cette augmentation de capital. Il conviendra néanmoins de rester vigilant sur les conséquences d’une telle décision, notamment au moment de l’intégration d’un nouvel associé.

2.10- En SCP : « Un homme une voix« 

L’une des particularités des SCP par rapport aux sociétés de capitaux est l’égalité existante dans le pouvoir politique accordé aux associés en assemblée générale. Peu importe le nombre de parts sociales détenues, chaque associé dispose d’une voix au moment du vote.

Le nouveau texte dispose à ce sujet :

Chaque associé dispose, sauf dispositions particulières du décret propre à chaque profession ou, à défaut, des statuts, d’une seule voix, quel que soit le nombre de parts sociales qu’il détient.

Pas d’évolution apportée par l’ordonnance sur ce point.

2.11- Répartition du résultat en SCP

En l’absence de disposition réglementaire ou de clause statutaire, chaque associé a droit à la même part dans les bénéfices, quel que soit le nombre de parts sociales qu’il détient.

Il est donc primordial de bien rédiger les clauses statutaires relatives à la répartition du résultat et le cas échéant attribuer des parts en industrie pour rééquilibrer les droits en cas de déséquilibre dans la répartition des parts sociales.

2.12- Départ de la SCP et sollicitation d’un office créé

Disposition reprise : L’officier public ou ministériel qui se retire d’une société en raison d’une mésentente entre associés peut solliciter sa nomination à un office créé à cet effet à la même résidence dans des conditions prévues par le décret particulier à chaque profession, à l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de sa nomination en qualité d’officier public ou ministériel associé au sein de cette société.

2.13- Cession des parts – Droit de retrait maintenu dans la SCP

Les parts sociales peuvent être cédées à des tiers avec le consentement des associés représentant au moins les trois quarts des voix. Toutefois, les statuts peuvent imposer l’exigence d’une majorité plus forte ou de l’unanimité des associés.

Si la société a refusé de donner son consentement, les associés sont tenus, dans le délai de six mois à compter de ce refus, d’acquérir ou de faire acquérir les parts sociales, à un prix représentant leur valeur déterminée ou, lorsque les statuts ne prévoient pas les modalités de détermination du prix, à un prix fixé dans les conditions prévues par l’article 1843-4 du code civil.

Sauf disposition contraire des statuts, les parts sociales sont librement cessibles entre associés.

Lorsqu’un associé le demande, la société est tenue, soit de faire acquérir ses parts par d’autres associés ou des tiers, soit de les acquérir elle-même, dans les conditions déterminées par le décret particulier à chaque profession. Dans le second cas, la société est tenue de réduire son capital du montant de la valeur nominale de ces parts.

Livre III : Dispositions générales relatives aux SEL(Articles 40 à 95)

LE LIVRE III traite de la société d’exercice libérale et regroupe l’ensemble des dispositions du titre Ier de la loi n° 90-1258 précitée.

Les SEL sont également divisées en trois catégories : Les professions libérales de santé, les professions libérales juridiques et judiciaires et les autres professions – qui ne sont pas nommées.

En nommant les trois familles de professions, il est possible désormais de distribuer les 28 alinéas des articles 5 et 6 en dispositions dites « communes » complétées par trois séries de dispositions dites « spécifiques » correspondant à chacune des trois familles de profession.

Le nombre d’articles augmente de manière conséquente mais l’intelligibilité des dispositions en est nettement améliorée.

Concernant les SELARL, comme pour les SCP, elles sont maintenues et certaines dispositions, qui les opposaient aux sociétés de droit commun sont également maintenues.

3.1- Immatriculation après l’agrément du garde des Sceaux et début d’exercice le lendemain de la publication au JO

L’ordonnance maintient la règle imposant aux SEL d’attendre d’être agréées ou titularisées dans l’office par le garde des Sceaux avant de pouvoir procéder à leur immatriculation définitive.

Cette règle ne s’appliquait pas aux sociétés de droit commun qui devaient être définitivement immatriculées, en amont du dépôt du dossier à la Chancellerie (pour les commissaires de justice et les notaires).

Pour autant et même si la Société n’existe pas encore (le kbis n’étant délivré que quelques jours après l’établissement des formalités d’immatriculation sur le guichet unique), la SELARL débute son activité dès le lendemain de la parution au JO de sa nomination (pour être exact, le soir même du jour de parution de sa nomination au JO, à minuit). Ainsi, les actes signifiés le lendemain de la parution au JO devront l’être sur la nouvelle entité.

3.2- Nouvelles obligations pour les SEL :

Les associés de SELARL sont tenus d’adresser annuellement à leur ordre la composition du capital social de leur société.

A partir de l’entrée en vigueur de cette ordonnance, soit le 1er septembre 2014, ils devront également fournir une copie à jour de leurs statuts et la répartition des droits de vote au sein de la société.

Ils devront en outre fournir les conventions contenant des clauses sur l’organisation et les pouvoirs des organes de direction ayant fait l’objet d’une modification au cours de l’exercice écoulé. Les modalités paraîtront dans un décret spécifique pour chaque profession parce que des questions se posent notamment sur les pactes d’associés qui pourraient contenir certaines clauses de cette nature.

3.3- Règles de gouvernance confirmées, avec un délai de régularisation précisé

Seuls les professionnels exerçant au sein de la société peuvent prendre part aux délibérations (prévues par des textes rappelés par l’article 56 de l’ordonnance) lorsque les conventions en cause portent sur les conditions dans lesquelles ils y exercent leur profession.

Les gérants des sociétés à responsabilité limitée sont des associés exerçant leur activité au sein de la société.

À partir du 1er septembre 2024, dès que les conditions relatives à la gouvernance ne sont plus respectées, la SEL disposera d’un délai d’un an pour se mettre en conformité. À défaut, tout intéressé pourra demander en justice la dissolution de la société.

3.4- Détention majoritaire par les professionnels exerçants

Sous réserve des dispositions propres à chaque famille de professions :

– plus de la moitié du capital social et des droits de vote est détenue, soit directement, soit par l’intermédiaire d’une société de participations financières de professions libérales, par des professionnels exerçant au sein de la société.

Le complément du capital social et des droits de vote peut être détenu par :

– Des personnes physiques, professionnels exerçants, ou des personnes morales exerçant la profession constituant l’objet social de la société ;

– Pendant dix ans, des associés, personnes physiques qui, ayant cessé toute activité professionnelle, ont exercé cette profession au sein de la société ;

– Les ayants droit des personnes physiques mentionnées ci-dessus pendant un délai de cinq ans suivant leur décès ;

– Une SPFPL ;

– Des personnes exerçant une profession libérale réglementée de la même famille que celle mentionnée dans l’objet social.

 

Par dérogation à ces dispositions communes à toutes les SEL et concernant les SEL des professions juridiques et judiciaires, plus de la moitié du capital social et des droits de vote de la société peut également être détenue :


1° Par tout professionnel exerçant l’une des professions juridiques ou judiciaires ou par toute personne morale, établis en France, ou une personne européenne au sens de l’article 4, exerçant l’une quelconque des professions juridiques ou judiciaires ;


2° Par des sociétés de participations financières de professions libérales, à condition que la majorité du capital et des droits de vote de celles-ci soit détenue par des personnes exerçant l’une des professions de la famille des professions juridiques et judiciaires, établies en France, ou par une personne européenne au sens de l’article 4.


Cette société comprend au moins, parmi ses associés, directement ou par l’intermédiaire d’une société de participations financières de professions libérales, une personne exerçant la profession constituant l’objet social de la société.

3.5- Mésentente et demande d’un office créé : rétablissement d’une faculté supprimée en 2015

La loi 2015-990 du 6 août 2015 avait supprimé la possibilité, pour un officier public ou ministériel qui se retire d’une SEL en raison d’une mésentente entre associés, de solliciter sa nomination à un office créé à cet effet à la même résidence, dans les 5 ans suivant sa nomination en qualité d’officier public ou ministériel associé au sein de cette SEL.

Cette possibilité est rétablie par l’ordonnance (article 57).

Livre IV : Dispositions générales relatives aux SPE (Articles 96 à 109)

Le livre IV traite de la société pluri-professionnelle d’exercice (SPE).


Il est composé d’une réécriture à droit constant des articles 31-3 et suivants de la loi 90-1258.

La lecture des dispositions relatives à la SPE est ainsi simplifiée en concentrant l’ensemble des règles relatives à la SPE dans un seul livre.

4.1- Une neuvième profession ajoutée

Rappelons que la SPE est une société d’exercice libéral qui a la particularité, du fait de son objet social, d’être pluri-professionnelle, pouvant regrouper les activités de huit professions (avocat, commissaire de justice, notaire, administrateur judiciaire, mandataire judiciaire, conseil en propriété industrielle, commissaire aux comptes, expert-comptable).

A compter du 1er septembre 2024, les géomètres-experts pourront intégrer à leur tour une SPE.

4.2- Clarification sur la mise en commun de moyens

Le cadre des sociétés pluri-professionnelles d’exercice (SPE) ouvre désormais explicitement la possibilité pour les associés de mettre en commun les moyens matériels, notamment immobilier, nécessaires au fonctionnement de leur activité.

4.3- Définition de la SPE enrichie d’une profession :

La société pluri-professionnelle d’exercice a pour objet l’exercice en commun de plusieurs des professions d’avocat, d’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, de commissaire de justice, de notaire, d’administrateur judiciaire, de mandataire judiciaire, de conseil en propriété industrielle, de commissaire aux comptes, d’expert-comptable et de géomètre-expert.

Elle ne peut exercer les professions constituant son objet social que par l’intermédiaire d’un de ses membres ayant qualité pour exercer l’une de ces professions au sein de la société.

Pour l’exercice des professions constituant son objet social, la société peut mettre en commun des moyens matériels, notamment immobiliers.


La totalité du capital social et des droits de vote est détenue par les personnes suivantes :

1° Tout professionnel exerçant réalisant, au sein de la société ou en dehors, l’une des professions mentionnées et exercées en commun au sein de la société ;

2° Toute personne morale dont la totalité du capital social et des droits de vote est détenue directement ou indirectement par une ou des personnes mentionnées au 1° ;

La société pluri-professionnelle d’exercice comprend, parmi ses associés, au moins un membre de chacune des professions qu’elle exerce.

Même règle que pour les SEL à partir du 1er septembre 2024, en cas de non-conformité avec ces dispositions, la SPE aura un an  pour se mettre en conformité.

4.4- Fonctionnement précisé de la SPE dans le nouveau texte

Les statuts de la société comportent des stipulations propres à garantir :

– d’une part, l’indépendance de l’exercice professionnel des associés, des collaborateurs libéraux et des salariés

et, d’autre part, le respect des dispositions encadrant l’exercice de chacune des professions qui constituent son objet social, notamment celles relatives à la déontologie.

La société pluri-professionnelle d’exercice informe le client qui envisage de contracter avec elle :

– de la nature de l’ensemble des prestations qui peuvent lui être fournies par les différentes professions qu’elle exerce

– et de la possibilité dont il dispose de s’adresser à l’une ou plusieurs de ces professions pour les prestations qu’elles offrent.

Le client désigne les professionnels exerçants réalisant leur activité au sein de la société auxquels il entend confier ses intérêts.

LIVRE V : Dispositions générales relatives aux SPFPL (Articles 110 à 128)


LE LIVRE V est une reprise du titre IV traitant des sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL)

5.1- Élargissement salvateur du champ d’application des SPFPL

Les SPFPL ont pour objet la détention de parts ou d’actions de sociétés d’exercice et de groupements de droit étranger, ayant eux-mêmes pour objet l’exercice d’une ou plusieurs professions libérales réglementées.

Les sociétés de participations financières de professions libérales peuvent détenir, gérer et administrer tous biens et droits immobiliers et fournir des prestations de services, sous réserve que ces activités soient destinées exclusivement au fonctionnement des sociétés ou groupements dans lesquels elles détiennent des participations.

Sous cette réserve, elles peuvent notamment détenir des parts sociales ou actions de toute société à forme civile ou commerciale aux seules fins d’acquérir et d’administrer des immeubles.

Des décrets à paraître pourront prévoir que les SPFPL de certaines professions juridiques et judiciaires puissent également détenir des parts ou actions de sociétés commerciales, sous réserve que l’objet de ces dernières soit la réalisation de toute activité que les professionnels détenant la SPFPL sont autorisés à exercer conformément aux règles applicables à chacune des professions.

Ainsi les SPFPL peuvent prendre des participations :

– dans les sociétés d’exercice des professions réglementées de droit (c’était déjà possible),

– dans les SCI à la condition que les biens immobiliers soient pour l’usage des membres des sociétés d’exercice également détenus (déjà possible)

et nouveauté, dans les sociétés exerçant des activités accessoires (dès parution du décret annoncé à  cet effet)

5.2- Champ d’application des SPFPL pluri-professionnelles

Les sociétés de participations financières ayant pour objet la prise de participation dans des sociétés pluri-professionnelles d’exercice, dans des sociétés d’exercice exercent, au moins, deux des professions d’avocat, de commissaire de justice, de notaire, d’administrateur judiciaire, de mandataire judiciaire, d’expert-comptable, de commissaire aux comptes, de conseil en propriété industrielle ou de géomètre-expert.

5.3- Détention du capital de la SPFPL pluri-professionnelle

Plus de la moitié du capital et des droits de vote est détenue par des personnes qui exercent l’une des professions exercées par la ou les sociétés faisant l’objet d’une prise de participation (article 114).

Par dérogation à l’article 114, lorsqu’au moins une des sociétés faisant l’objet d’une prise de participation exerce une profession juridique ou judiciaire, plus de la moitié du capital et des droits de vote de la SPFPL peut également être détenue par toute personne admise à détenir la majorité du capital et des droits de vote de la ou des sociétés faisant l’objet de la prise de participation.

Le complément du capital et des droits de vote peut être détenu par :


1° Pendant un délai de dix ans, des personnes physiques qui ont exercé au sein de la ou d’une des sociétés faisant l’objet d’une prise de participation, la profession constituant son objet social, et qui ont cessé d’exercer cette profession ;


2° Pendant un délai de cinq ans à compter du décès des personnes physiques mentionnées à l’article 114 et au 1° du présent article, leurs ayants droit ;


3° Des personnes exerçant une profession libérale réglementée de la même famille que celle exercée par l’une des sociétés faisant l’objet d’une prise de participation.

5.4- Direction de la SPFPL

La direction des SPFPL est assurée par des professionnels exerçants réalisant leur activité au sein de la ou des sociétés dans lesquelles la société de participations financières de professions libérales détient des participations (gérant ou président selon la forme sociale).

Ainsi, les dirigeants de la SPFPL pluri-professionnelle doivent nécessairement être des professionnels exerçants au sein de la ou des sociétés détenues par la SPFPL.


Lorsque la société détient une participation dans au moins une société exerçant une profession juridique ou judiciaire, les fonctions mentionnées aux articles 119 à 122 peuvent être également exercées par toute autre personne admise à détenir la majorité du capital social et des droits de vote de cette société.

5.5- Détention du capital de la SPFPL mono-professionnelle

Lorsque la société de participations financières a pour objet la prise de participations dans une ou plusieurs sociétés exerçant une même profession juridique ou judiciaire, plus de la moitié du capital social et des droits de vote de cette société peut être détenue par toute personne, établie en France ou étant une personne européenne, exerçant l’une des professions juridiques ou judiciaires.

5.6- Un élargissement des prises de participations possibles

A compter du 1er septembre 2024, le périmètre des participations qu’une SPFPL peut détenir est élargi, pour permettre d’intégrer les structures d’exercice de professions libérales, au-delà de celles actuellement admises (SARL, SA, SCA et SAS régies par le livre II du code de commerce, qui relevaient historiquement de la loi 66-537 du 24 juillet 1966) (ord. 2023-77 du 8 février 2023, art. 110, al. 4).

Ainsi, une société d’experts comptables créée en vertu de l’ordonnance 45-2138 du 19 septembre 1945 pourrait être détenue par une SPFPL.

Livre VI : Dispositions diverses

En conséquence de l’adoption de cette ordonnance,

Sont abrogés deux des textes qui constituaient la « Bible » des professionnels accompagnant les créations et/ou restructurations d’entreprises :

Sont donc notamment abrogées :


1° La loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles ;


2° La loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l’exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales ;


Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur au 1er septembre 2024.

Conclusion

La promesse est tenue : la lisibilité des dispositions des sociétés d’exercice est nettement améliorée. Les professionnels du droit auront plaisir à retrouver l’ensemble des dispositions relatives à l’exercice des professions libérales dans un seul texte.  Un seul texte… en y ajoutant tous les décrets d’application à paraître !

Nous pouvons cependant regretter le fait qu’un grand nombre de points n’ait pas évolué, notamment au sujet des SCP qui restent toujours aussi rigides.

Laïaché LAMRANI

Expert-comptable, spécialisé commissaires de justice

Expert-conseil, Master de Droit et Fiscalité de l’Entreprise – DJCE

Chargé d’enseignement Panthéon Assas II

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